Secondes vies : Booki, librairie solidaire en ligne du label Emmaüs

Lorsque approche Noël, de plus en plus de consommateurs se disent prêts à acheter leurs cadeaux en seconde main (47%, selon un sondage réalisé en 2021, contre 18% en 2020). Les raisons invoquées sont à la fois économiques et environnementales.

A Saint-Brieuc, dans les Côtes d’Armor, les employés en insertion professionnelle de Booki  préparent les commandes  de livres qui s’intensifient depuis le début du mois de novembre. 

Créée en 2017, cette librairie imaginée par 11 communautés Emmaüs du grand ouest, fut l’une des premières à récupérer les invendus de leurs magasins pour les vendre en ligne.

Ici, les livres comme les humains se préparent pour une nouvelle vie.

Chaque matin, des box jaunes sont livrées au local de Booki. Elles contiennent les livres invendus des magasins Emmaüs de Bretagne. Le fond de la librairie est également constitué d’anciens livres de bibliothèques de la région.
 

Les caisses de livres sont d’abord pesées puis consignées, numérotées. Les livres sont alors triés un par un.

En effet, tous ne seront pas revendus. Les employés en insertion professionnelle trient les livres en fonction de leur état, mais aussi de leur potentiel de vente.

Tout ce qui n’est pas conservé repartira pour le pilon. Ils seront détruits pour être recyclés.  En moyenne, Booki conserve 30% des livres reçus.
 
Pierre, 27 ans, est graphiste de formation. Il a monté son autoentreprise, mais le COVID ne lui a pas permis de continuer. Alors qu’il vient d’avoir un bébé, cet emploi lui permet d’obtenir une stabilité pour le moment et de penser à son avenir. Il souhaiterait travailler dans la réparation, le reconditionnement et le recyclage de l’informatique, pour lequel il recherche une formation.
 
Selon Pierre, certains livres arrivent en bon état, surtout ceux des bibliothèques, mais certaines caisses contiennent beaucoup de livres très abimés.
 
 Chaque livre conservé est ensuite entré dans un logiciel. Pierre y inscrit son état général.
 
Depuis le début de la librairie, une quarantaine de personnes ont été salariées en insertion. Si le contrat d’insertion est de maximum  24 mois, en moyenne les salariés restent 13-14 mois à Booki. Aujourd’hui, le taux de sorties positives, c’est-à-dire les personnes qui à l’issue de cette expérience trouvent un emploi ou une formation, est de 82%.
 
Roxane Belliard est responsable du site. Ancienne salariée de la restauration, elle est arrivée au début de l’aventure, en 2017. «  Ce qui est vraiment intéressant, c’est le double travail. Il y a le commerce, avec des attentes comme dans n’importe quelle entreprise, mais aussi le travail en équipe, faire découvrir l’activité à des personnes en insertion, les faire monter en compétence. C’est beau de voir des personnes qui avaient perdu toute confiance en elles et qui repartent en n’étant plus les mêmes. »
 
Tous les matins, sont préparées les commandes de la veille. Les livres sont vendus sur quatre plateformes : Amazon, Rakuten, la FNAC et Label Emmaus.
Sur les rayons, 110 000 livres sont rangés par formats.
 
Les livres sont vérifiés avant d’être expédiés. Il doivent être conformes à l’achat.
Les employés sont également formés au service après vente, élément indispensable du e-commerce. A la fin de son parcours, chaque personne doit être polyvalente.
 
Lionel Cocherie est codirecteur de Retrilog, l’entreprise d’insertion au sein de laquelle existe Booki. Avant ce poste, il  était directeur opérationnel dans la grande distribution. Aujourd’hui il trouve plus de sens à son emploi. « C’est à la fois une entreprise classique avec les mêmes règles, les mêmes obligations, on utilise les mêmes plateformes, comme Amazon ou la Fnac. Tout le monde se doit de travailler, comme partout ailleurs, mais ici c’est dans la bienveillance, l’accompagnement, pas dans la performance. Ce qui prime, c’est toujours le collectif. C’est une des clefs de la réussite pour des personnes qui se sont souvent retrouvées isolées dans leurs parcours. »
 
« L’abbé Pierre a construit Emmaüs autour de valeurs comme l’humanité , la bienveillance, la solidarité, mais aussi le travail, poursuit Lionel. Et cela autour du déchet. On voit à quel point c’est important aujourd’hui dans la lutte pour le climat, et  celle contre le gaspillage »
 

Une fois vérifiée, la commande est prête à être expédiée.

« Beaucoup de nos ventes se font à l’étranger. On envoie des livres dans le monde entier, explique Roxane, d’ailleurs beaucoup sont envoyés au Canada. »

« Au début, nous avons commencé avec 5 commandes par jour, commente Roxane. Et puis, il y a eu l’effet COVID, le e-commerce a augmenté, nous avons aussi un nouveau public, qui fait le choix d’acheter en seconde main. Aujourd’hui nous vendons en moyenne 30 000 livres par an. Noël a un grand impact sur les ventes. Les ventes en novembre – décembre représentent 30% de l’année